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Table ronde

Les acteurs du développement économique et de la politique de la Ville : quelle logique de collaboration aujourd'hui ?

Avec ses nombreuses zones d’activité, Vitrolles présente un fort potentiel de développement économique et poursuit l’accueil de grandes entreprises sur son territoire. Les secteurs les plus représentés sur la commune  : les services (transport et logistiqu

Un exemple de projet où la coopération entre acteurs a fonctionné : la station Alexandre  est le symbole de la réussite des Zones franches urbaines à Marseille.

 

Cette table ronde, qui faisait suite à un groupe de travail inter-acteurs mis en place par le CRPV PACA et déjà animé par Marie-Laure BEAUFILS, avait pour ambition de partager les points de vue sur les expériences de cette relation parfois difficile que nouent les acteurs de la politique de la Ville avec ceux du développement économique. Quelles logiques de co-constrution possible ?

UNE EXPERIENCE ANCIENNE DE LA POLITIQUE DE LA VILLE

C’est par l'expérience de rapprochement entre l'équipe de Manuel VANNI (chef de service "Développement économique" à Toulon Provence Méditerranée) et celle formant le service politique de la Ville de la communauté d’agglomération qu'a débuté cette table ronde. Une
collaboration largement facilitée par le profil du technicien : « avant d’intégrer les services économiques, j’ai été pendant 15 ans coordinateur
d’une des ZFU de l’ancien Contrat de ville ». C’est à l'évidence cette double culture qui l’a poussé à aller un peu plus loin que son rôle initial – c'est à dire entretenir la soixantaine de zones d’activité que compte l’agglomération. Convaincu de l’effet levier, mais aussi des limites de l’insertion par l'activité économique,
il a souhaité proposer au sein de son service une fonction de support aux contrats d’insertion.
 

«Traiter ce que les grands groupes privés ne faisaient pas, et surtout donner plus de visibilité à ce type de dispositifs habituellement portés par la politique de la Ville, mais à une échelle trop confinée ». Dans les faits, c'est un projet qui a inévitablement rapproché les deux services : « désormais on se croise plusieurs fois par an ; ce qui n’était pas vraiment le cas jusque-là ». Des relations renforcées qui se sont inévitablement traduites en actions. Parmi les coopérations interservices, Manuel VANNI cite l’installation d’un village d’entreprises (issues de la filière touristique) pendant le Tour de France à la voile, au sein duquel le service "politique de la Ville" a mobilisé ses partenaires (Pôle Emploi et la Mission locale) pour mettre en avant les demandeurs d’emploi issus des quartiers, dans des secteurs où ils sont habituellement peu représentés.

 

« Tout ceci permet de démystifier l’entreprise aux yeux des demandeurs d’emploi, comme de casser l’image négative des quartiers et de leurs habitants ».

 

UNE FACILITATRICE FAISANT LE LIEN...
Marie GIRAULT est à la fois cheffe de projet politique de la Ville à Cagnes-sur-Mer et en charge de la thématique transversale "développement
économique/emploi" au sein de la Direction de la Cohésion Sociale à Nice Métropole. Dès lors, travailler dans le domaine du développement
économique fait forcément partie de son quotidien. Dans les faits, cette position d’intermédiaire facilite grandement sa mission : « cela favorise les rencontres entre les demandeurs d’emploi issus des quartiers et les entreprises – qu’elles soient implantées à proximité des dits quartiers ou même qu’elles en soient très éloignées ». Ainsi les chômeurs peuvent aller visiter les entreprises, et vice versa des représentants d’entreprises peuvent venir dans les quartiers pour participer à des tables rondes ou à des simulations d’entretien d’embauche.

 

« Tout ceci permet de démystifier l’entreprise aux yeux des demandeurs d’emploi, comme de casser l’image négative des quartiers et de leurs habitants ». Reste que cette ouverture n’est pas toujours naturelle. Elle passe par la mutualisation de l’ensemble des réseaux des partenaires des différents services : si les acteurs de la politique de la Ville bénéficient des "entrées » du service "Développement économique", en contrepartie, le service du DSU apporte une certaine expertise sur la Responsabilité sociale des entreprises (RSE), en partie grâce à la connaissance du territoire et de ses acteurs associatifs. « C’est du gagnant-gagnant ».
 

UNE PASSERELLE ASSOCIATIVE ENTRE LES HABITANTS ET LE SYSTÈME
C’est justement du positionnement associatif dont a témoigné Salah TACHOUKAFT, directeur de PlaNet Adam Marseille - une association
spécialisée dans l’accompagnement à la création d’entreprises en ZUS. Mais ce n'est pas tant les relations entre les acteurs institutionnels qui l'intéressent : « nous sommes là pour faire la passerelle entre l’humain et l’économique, mais aussi entre l’habitant et le système ».

 

Par-delà l’ambition d’être à l’écoute, de donner confiance, les salariés de l'association essayent surtout d’épauler individuellement les personnes tout au long de leur parcours. « Il est question de ne pas laisser partir
des personnes sur des projets rêvés » résume le responsable associatif. Concrètement, le rôle des intervenants de l’association consistera à aiguiller un jeune en projet de création
d’entreprise vers la formation qui lui permettra de mener son projet à bien. Dans d’autres cas, ils devront débroussailler le cadre légal dans lequel s’inscrira un projet précis. Car
contrairement à ce que certaines personnes croient, « tous les habitants des quartiers ne sont pas des ingénieurs en combine sociale ! Ils ont besoin qu’on les aide à se départir de la jungle réglementaire et institutionnelle ».


« Il ne faut pas rêver, lorsque les entrepreneurs viennent s’installer dans les quartiers, ils ne le font que très rarement à des fins philanthropiques. Ce qui les intéresse, c’est la carotte fiscale. Dès lors, peu importe l'institution qu'ils rencontrent du moment qu’on leur garantit un avantage financier ».

 

À LA RECHERCHE DE PARTENAIRES FINANCIERS
Abou DIARRA a également une double casquette : entrepreneur (expert-comptable), il est aussi président d’une association d’entrepreneurs.
À ce titre, il connaît relativement bien les relations qu’entretiennent les entreprises avec les collectivités – en l’occurrence Marseille Provence Métropole. « Vers qui vous tournez-vous ? Vers les services de développement économique ou ceux de la politique de la Ville ? » lui demande Marie-Laure BEAUFILS.

 

C’est d’abord le président associatif qui répond : « peu importe, nous recherchons avant tout des partenaires financiers en mesure de nous subventionner ». Mais la réponse du chef d’entreprise, et plus exactement de l’expert-comptable en charge du plan de financement de plusieurs entreprises implantées en ZFU, n’est pas très éloignée : « il ne faut pas rêver, lorsque les entrepreneurs viennent s’installer dans les quartiers, ils ne le font que très rarement à des fins philanthropiques.

Ce qui les intéresse, c’est la carotte fiscale. Dès lors, peu importe l'institution qu'ils rencontrent du moment qu’on leur garantit un avantage financier ».
 

Pour autant, lorsqu’ils coopèrent, le privé et le public peuvent donner naissance à des projets à forte valeur ajoutée économique et sociale.
La Station Alexandre dans le 14ème arrondissement de Marseille, ancienne friche urbaine située en ZFU, est un bon exemple. Par la volonté des pouvoirs publics (dont notamment la CDC) et avec le soutien de partenaires privés, ces derniers sont parvenus à faire exister un nouveau pôle d’activités dans ce secteur de la ville.


L'ESS COMME LEVIER
L’Économie Sociale et Solidaire (ESS) est une autre passerelle entre l’humain et l’économique. C’est en tous les cas un pan à part entière de l’économie pour Gwenaëlle RUBINSTEIN, Cheffe de service adjointe du Service Développement de l’Économie Sociale et Solidaire, Direction des Parcours Professionnels à la Région PACA. « Même si ils répondent à des nécessités d’utilité publique, les acteurs de ce secteur ont besoin de développer des activités marchandes ». C’est d’ailleurs dans la perspective d’assurer la pérennité de ces structures et de leurs salariés sur le territoire
régional que le service de Mme RUBINSTEIN les accompagne pas à pas. Parmi les actions conduites par son service, l’intervenante cite la mise en place d’un dispositif visant à diversifier les secteurs d’application des clauses sociales. C’est ainsi que le Conseil régional a fait le forcing pour clauser tous les marchés concernant la construction et/ou la rénovation des lycées. « Mais outre les classiques marchés du BTP, nous avons souhaité donner aux structures d’insertion la possibilité de se positionner également sur des marchés de maintenance quotidienne ». Un élargissement qui s’effectue avec l’aide des services en charge de la politique de la Ville à la Région : « ils participent à la sensibilisation des collectivités sur ces sujets-là ».

 

Autre exemple de coopération mis en relief par l’intervenante et dans lequel s’implique le service "Économie Sociale et Solidaire" : un projet d’épicerie sociale. Au-delà de son activité de commerce alimentaire à bas coût, ses initiateurs issus d’un quartier dit sensible se sont également lancés dans deux autres activités qui leur tenaient à coeur : le développement d’un circuit agricole court et des actions d’éducation à la santé. Deux prestations complémentaires qui n’ont survécu qu’avec le soutien de deux autres services de l’institution régionale, les services "Agriculture" et "Santé/solidarité".

 

ATELIER REGIONAL

CRPV-PACA

 

#19

Compte-rendu

conférence du

14 nov. 2013

Bonus

> Analyse du CRPV 

Pour une meilleure collaboration entre acteurs

L’articulation entre les acteurs du développement
économique et de la politique de la Ville passe d’abord par un renouvellement des pratiques des élus locaux et des orientations de l’État et des Collectivités locales.
Il est certains que le positionnement des
techniciens est stratégique dans cette articulation.

 

Quelques expériences montrent que le développement de projet commun entre deux services est souvent favorisé par les liens personnels que peuvent entretenir deux chefs de services ; cela peut être aussi le cas entre association et collectivités
locales. Par conséquent, pour éviter que des projets interservices ou inter-association reposent simplement sur des relations interpersonnelles, il est important de formaliser un réel cadre de travail partenarial.

 

Cependant les injonctions paradoxales de certains dispositifs - comme par exemple les CUCS - peuvent être aussi un frein dans
les relations entre acteurs. Dans un contexte où l’État est de plus en plus en retrait, il peut se développer d’un côté des formes de coopérations, et de l‘autre, un climat de concurrence et de compétition entre opérateurs de terrain.

 

Ces processus se traduisent par des textes où l’État et les Collectivités Locales prescrivent de la coopération d’un côté, et de l’autre, mettent en place des "appels à projet" avec un budget limité qui engendrent forcément de la compétition. Il y a un esprit antinomique de «coopé-tition (coopération / compétition) qui apparaît.

 

Ensuite il est nécessaire d’ouvrir « les périmètres physique et psychologique ». Comme le disait si bien une cheffe de Projet RU, participant à la démarche entamée sur le développement économique par le CRPV-PACA : « il faut savoir se dézoner, se décentrer ». Comment faire lorsque le quotidien d’un chef de projet Politique de
la Ville et Développement Économique est fait non seulement de périmètres limités à des politiques de zonage, mais aussi à une
fiche de poste restreignant ses missions et marges de manoeuvre. Ce double enjeu, présenté ci-dessus, appelle un changement de regard sur la culture professionnelle dans laquelle nous nous enfermons. Il faut avoir
le courage d’ouvrir ce regard et d’aller audelà de nos frontières limitées par un statut et des dispositifs réglementés. On doit pouvoir, aujourd’hui, formaliser ces manières de faire qui restent souvent à la marge de nos missions. La vision partagée peut-être un facteur propice au « dézonage ».

 

Enfin, c’est effectivement par une culture partagée nécessitant une connaissance des
acteurs et des enjeux qui les entourent, qui permettra une meilleure collaboration entre les acteurs. Pour cela, il faut détruire (sortir du cadre) pour reconstruire une connaissance essentielle, partagée et réciproque (qui fait quoi ? rôles et enjeux,…). Ce qui permettra de développer des espaces d’échanges assurant une vision élargie et décadrée de chacun des protagonistes.

 

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