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Intervention

Diagnostiquer

et programmer...

à tête reposée

Jérémy Harter, architecte à l'agence Harter,

et Gilles Fauré, ingénieur au bureau d'études Technisphère

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Alors même que les questions de performance énergétique polarisent une forte attention, de nombreux acteurs rappellent que ce n’est pas la seule approche à soigner dans le cadre d’une opération de rénovation. Une analyse plus globale s’impose pour éviter les méfaits de besoins mal estimés et surtout empêcher le drame d’une démolition décidée à la va-vite. Typologie particulièrement propice à la rénovation, les équipements publics construits entre 1945 et 1975 sont bien évidemment concernés par cette prescription : protéger son patrimoine, c’est d’abord bien diagnostiquer.

 

Plutôt rénover que construire

Selon Jérémie Harter et Gilles Fauré, les équipements publics édifiés durant la période 1945-1975 ne font pas exception à la règle : leur rénovation reste le plus souvent préférable à leur  démolition. Il existe plusieurs raisons à cette option. En premier lieu, les maîtres d’œuvre ont à faire à des édifices qui présentent un état plus que correct, notamment avec des structures solides en béton armé. Dès lors, pourquoi dépenser beaucoup d’argent pour la conception et la réalisation d’une nouvelle structure ?

L’approche environnementale tend également à favoriser le choix de la rénovation : l’analyse du bilan carbone d’un chantier de construction s’avère plus élevé.

La raison affective peut être également avancée, dans le sens où de nombreux équipements constituent un symbole et/ou un repère forts dans la cité. C’est ainsi que malgré une architecture souvent simpliste, qui rend l’appropriation de ces bâtiments plus difficile, les citoyens sont nombreux à y être attachés – chaque génération s’y est construit des souvenirs.

Enfin, on ne peut faire fi des raisons patrimoniales ; pas seulement le patrimoine culturel ou historique que représentent certains édifices, mais plus largement le patrimoine financier avec en arrière plan l’idée d’entretenir du mieux possible ce potentiel, pour le valoriser et le faire fructifier en bon père de famille.

 

 

 

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La question des coûts

Si le coût de construction d’un bâtiment neuf s’élève en moyenne de 1500 à 2000 euros/m2, il se situe entre 500 et 1000 euros/m2 pour le rafraîchissement d’un bâtiment simple, et au dessus de 1000 euros/m2 pour une rénovation lourde effectuée dans les règles de l’art.

 

Autre information budgétaire indiquée par les intervenants : l’opération de désamiantage devra être réalisée dans le cadre d’une démolition/reconstruction, au même titre et approximativement pour le même coût que dans le cadre d’une rénovation.

 

Les phases à respecter…

Devant la simplicité structurelle de ces bâtiments, l’erreur serait de vouloir passer directement à la phase opérationnelle de la réhabilitation en éludant une analyse préalable. Mal définie, peu codifiée, nécessitant des visions transversales, celle-ci est pourtant cruciale à 3 niveaux :

> elle permet d’abord de mieux définir ce que l’on attend de la transformation. La tentation pour le maître d’ouvrage de jouer à l’architecte est souvent grande. C’est pourtant ce qu’il faut éviter. Il doit s’en tenir à définir les besoins en tenant compte de la localisation du bâtiment, de ses évolutions prévisibles ou encore du budget alloué au projet. 

> Ce niveau du projet correspond au temps des diagnostics. Sans les multiplier, deux d’entre eux revêtent plus d’importance : le diagnostic amiante et le diagnostic technique. S’il s’impose avant travaux, il est préférable d’effectuer le premier le plus tôt possible pour ne pas avoir de mauvaises surprises une fois le projet ficelé budgétairement. Pour le second, malgré le bon état général des structures, une attention particulière devra être portée sur les fondations et/ou les surcharges de planchers - surtout dans le cas d’un changement d’usage.

> La faisabilité du programme découle de l’assemblage des éléments précédents. Concrètement, à partir des paramètres dont il a pris connaissance en amont, cette phase permet au maître d’ouvrage d’identifier les objectifs et les limites du projet avec à la clef, si nécessaire, son réajustement technique et budgétaire.

 

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La problématique de la qualité de l'air

Si le bâtiment des années 70, dans son jus, consomme approximativement 2,5 fois plus qu’un bâtiment moderne, une fois rénové, ses consommations énergétiques pourront être divisées par deux et ainsi se rapprocher des performances d’un bâtiment neuf.

 

Revers de la médaille, la plupart du temps, ce gain énergétique risque de révéler une nouvelle problématique : la mauvaise ventilation. En effet, il faudra désormais gérer une enveloppe devenue parfaitement hermétique mais, paradoxalement, très mal aérée !

 

Une question avant tout architecturale et urbaine

Si le désir de rénover le patrimoine constitué par les équipements publics de cette période est dicté par un cahier des charges normatif à respecter (normes thermiques, mise en accessibilité, désamiantage…), l’approche architecturale continue à prévaloir. En effet, que l’édifice concerné soit ou ne soit pas identifié comme un bâtiment historique, l’opération va à coup sûr demander des interventions d’ordre esthétique sur la façade – souvent accompagnées d’une extension - ou encore va imposer un nouveau questionnement sur le rapport du bâtiment à la rue et au tissu urbain dans lequel il s’inscrit.

 

Dès lors, divers niveaux d’intervention peuvent être posés très concrètement dans le programme du maître d’ouvrage :

> dans certains cas, on peut s’orienter vers une restauration discrète afin de mettre en valeur un intérêt architectural ou culturel manifeste. Ce peut être la même philosophie d’intervention qui l’emporte lorsque le bâtiment rénové fait partie d’un ensemble qui doit rester cohérent (exemple du lycée Le Garros à Auch).

> Dans d’autres cas de figure, lorsque le bâtiment est mal implanté dans la ville et surtout mal aimé, on peut privilégier une requalification plus importante pour prodiguer une nouvelle qualité à cet équipement (exemple du CLAE de Fenouillet).

> Dans tous les cas, la rénovation « hard » ou « soft » de ces équipements doit poser la problématique de l’espace urbain alentour. Dès lors, l’une des questions phares du diagnostic concerne la limite de l’intervention : il serait fort saugrenu de s’arrêter au pied des façades. Au contraire, il est nécessaire d’avoir une réflexion ex situ et prendre en compte les abords de l’édifice. Pour ce faire, la réalisation d’une étude de site sera la bienvenue.

CLAE de Fenouillet avant travaux

CLAE de Fenouillet avant travaux

CLAE de Fenouillet après travaux

CLAE de Fenouillet après travaux

Ecole Soupetard (Toulouse)

Ecole Soupetard (Toulouse)

Avant travaux

Ecole Soupetard (Toulouse)

Ecole Soupetard (Toulouse)

Après travaux

Lycée Garros à Auch

Lycée Garros à Auch

Détail des pathologies avant travaux

La villa Savoye

La villa Savoye

Vue artistique (dégradée) de l'édifice de Le Corbusier, classé monument historique dès 1965 - Oeuvre de Xavier Delory

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